Je résume sur cette page de mon journal le dialogue qui s'en est suivi, et qui a démarré justement sur ce dernier point, puisque j'ai tout de suite mis en évidence que cette question avait engendré des débats et des divergences depuis les débuts du christianisme.
J'ai en effet commencé par lui parler de Paul de Tarse, généralement cité comme un « paladin » du concept de la « résurrection du corps ».
« Dans les treize lettres qu'on lui a attribuées – lui ai-je rappelé à un certain moment – il y a aussi des passages dans lesquels apparaît même la position opposée, comme lorsqu'il dit « nous savons que, tant que nous habitons dans ce corps, nous sommes loin de notre patrie, loin du Seigneur (…) Oui, nous sommes pleins de confiance et nous aimerions mieux quitter ce corps pour aller vivre auprès du Seigneur » (2Cor 5,6-8) … ou bien quand il affirme « Ce que je veux dire, frères et sœurs, c'est que notre nature actuelle ne peut pas hériter du royaume de Dieu, et que ce qui est corruptible n'hérite pas non plus de l'incorruptibilité » (1Cor 15,50) ».
Je lui ai ensuite précisé que même si le « Credo apostolique », c'est-à-dire la profession de foi chrétienne du début du IIIe siècle, utilisait la formule « résurrection de la chair » (d'ailleurs déjà « assouplie » peu de temps après sous la forme de « résurrection des morts » du Credo de Nicée-Constantinople)... en réalité l'idée d'une tradition chrétienne qui soutienne « en bloc » le concept de « résurrection du corps » est un lieu commun démenti par les évidences historiques.
« La chrétienté des premiers siècles - ai-je poursuivi - oscilla toujours entre la perspective de la "résurrection du corps" et celle de l' "immortalité de l’âme", qui occupa beaucoup de place dans l'élaboration théologique patristique même par rapport à certains passages bibliques qui parlaient clairement en faveur du concept de l’âme immortelle ».
Je lui ai alors cité le Livre de la Sagesse dans lequel on peut lire ces paroles attribuées à Salomon « J'étais un enfant d'un bon naturel, et j'avais reçu en partage une bonne âme; ou plutôt, étant bon, je vins à un corps sans souillure. » (Sag 8,19-20)... et aussi, dans un autre passage « Car le corps, sujet à la corruption, appesantit l'âme, et sa demeure terrestre accable l'esprit aux pensées multiples. » (Sag 9,15).
« Oui – me dit-elle – mais il s'agit d'un livre biblique influencé par la philosophie grecque, et il faut donc le prendre avec des pincettes »...
« Ceux qui ont inséré ce Livre dans la Bible chrétienne – lui ai-je dit alors – ne pensaient pas comme vous, considérant évidemment ses contenus comme conformes aux développements théologiques en cours ».
J'ai ensuite continué en lui faisant remarquer que quelques experts du secteur parlent de « platonisme chrétien » par rapport aux élaborations théologiques des penseurs chrétiens anciens et influents qui concevaient le but ultime de l’être humain sur le plan de l'immortalité de l'âme, et qui au fond sont les « ancêtres » de l'actuelle Pensée eschatologique de l'Église Anima Universale, fondée sur les enseignements spirituels de Swami Roberto :
« Dans la Pensée théologique de notre Église – ai-je poursuivi – c'est l'individualité spirituelle, unique et non reproductible, qui est destinée à la Vie éternelle, à la fin d'un parcours terrestre qui peut aussi se développer dans plusieurs incarnations, toujours dans une progression évolutive ».
Tout en ayant suivi ces argumentations, mon interlocutrice du jour me fit observer qu'en tout cas cette perspective de vie éternelle exclusivement spirituelle ne lui semblait pas attestée par les Évangiles...
« En réalité – lui ai-je dit alors – par rapport à cela il y a plusieurs passages significatifs... à partir du simple et clair « Dieu est esprit » (Jn 4,24), qui ne laisse évidemment pas de place à l'idée que l'union avec Sa Réalité éternelle puisse advenir sur le plan corporel... comme le laisse entendre le Jésus de Marc même en disant « Quand on ressuscite d'entre les morts (...) on est comme des anges dans les cieux » (Mc 12,25).
À ce point, le dialogue s'est ensuite orienté vers l'autre aspect « à l'ordre du jour », rappelé justement par les paroles de Jésus « Quand on ressuscite d'entre les morts » qui peuvent faire penser à un temps futur, et qui ont poussé mon interlocutrice à me demander :
« Précisément : comment peut-on concilier ces paroles avec le concept de "Paradis-éternité" délié du temps ? »
Après lui avoir rappelé que le langage de Jésus s'adaptait aux contextes culturels où Il se trouvait à parler, contextes qui pouvaient être plus ou moins reliés à la tradition juive... j'ai ajouté que l'épisode qui permet de comprendre ce qu'Il pensait par rapport à ce sujet, est celui de la résurrection de Lazare, dans lequel Jésus s'adressait à Marthe en lui disant :
« “Ton frère ressuscitera”.
“Je sais - Lui répondit Marthe – qu'il ressuscitera lors de la résurrection, le dernier jour ».
Jésus lui dit : « C'est moi qui suis la résurrection et la vie ; celui qui croit en moi vivra, même s'il meurt et toute personne qui vit et croit en moi ne mourra jamais” ». (Jn 11,23-26)
Puis j'ai continué en lui disant « Ici Jésus ne parle certainement pas d'une résurrection des morts différée dans le temps, comme le pensait Marthe conformément à l'idée judaïque traditionnelle; Il se réfère au contraire à ceux qui adhèrent à Son message ("toute personne qui vit et croit en moi"), leur assurant une qualité de vie capable de dépasser la fin de la vie biologique. Dans cette perspective, la résurrection de Lazare devient le symbole de cette résurrection pour la Vie éternelle que chacun est appelé à conquérir dans le présent de sa propre existence ».
Le développement du discours m'a donc amené à entrer un peu plus dans le vif d'un concept théologique fondamental qui se trouve en particulier dans l'Évangile de Jean :
« La "Vie éternelle" dont parle Jésus – lui ai-je dit alors – n'est pas la vie qui vient après la mort, mais c'est la Vie divine qu'il est possible d'atteindre dès maintenant grâce à l'entrée dans la vie spirituellement vraie, que l’évangéliste appelle "zōē"... en la distinguant de la simple vie biologique, définie justement comme "bios", qui reste circonscrite dans les limites matérielles de la corporéité physique... ».
Voyant qu'elle avait le livre « Jésus de Nazareth » écrit par le Pape Ratzinger, je l'ai invitée à aller lire un passage justement significatif sur ce sujet :
« L'expression "vie éternelle" ne signifie pas - comme le pense peut-être d'emblée le lecteur moderne - la vie qui vient après la mort, alors que la vie présente est justement passagère et non pas une vie éternelle.
"Vie éternelle" signifie la vie elle-même, la vraie vie, qui peut être vécue aussi dans le temps et qui ensuite ne s'achève pas par la mort physique. C'est ce qui nous intéresse : embrasser d'ores et déjà "la vie", la vraie vie, qui ne peut plus être détruite par rien ni par personne ». (Pape Benoît XVI, « Jésus de Nazareth »)
« Comme vous l'aurez compris par rapport à ce que je vous ai dit précédemment - lui ai-je dit pour conclure - à la lumière de la Pensée spirituelle chrétienne-ramirique je tire de toute façon de ce principe évangélique de "vie éternelle" des conséquences qui sont incompatibles avec les élaborations théologiques catholiques en ce qui concerne la résurrection des "corps" (dans une forme indéterminée) à la fin des temps.
Pour le christianisme-ramirique, la plénitude de la « vie éternelle » se réalise au-delà de la forme... et au-delà du temps ».
J'ai ensuite salué mon interlocutrice du jour, même si quelques-unes des interrogations qu'elle avait exprimées par rapport au « purgatoire » étaient restées en suspens, parce que nous n'avions pas eu le temps matériel de les aborder.
Qui sait... peut-être y aura-t-il d'autres épisodes.
Étape suivante :
Étape initiale :